8. Vers la guerre
8.2. Poussées de fièvre
"La guerre qui vient" est dans tous les esprits en 1913. Le contexte international des guerres balkaniques y participe. Mais c'est surtout en France l'élection du meusien Raymond Poincaré ("poing carré") comme président de la République le 17 janvier 1913 qui sonne comme un avertissement nationaliste et lui confère l'aura d'un homme providentiel. Une véritable psychose de guerre se développe, défendue par la presse nationale comme Le Temps. La course aux armements bat son plein, répercutée par la loi des 3 ans présentée comme une réponse à une agression allemande imminente.
De l'autre côté, les Allemands célèbrent à grand bruit et force discours bellicistes le centenaire du soulèvement contre Napoléon Ier (1813) et les 25 ans de règne de Guillaume II. On inaugure le monument de la Bataille des peuples près de Leipzig et le mouvement alldeutsch (pangermaniste) est au plus haut. Enfin, pour l'état-major du Reich, 1914 est l'année ultime de la planification de la guerre au-delà de laquelle le risque – infondé - d'encerclement (Einkreizung) ne pourra plus être conjuré.
Au final, si 1913 apparaît bien comme l'année de tous les dangers, la suivante débute paradoxalement par un réel apaisement : les tensions reculent, les socialistes vainqueurs des législatives en France envisagent même l'abrogation de la loi des 3 ans… L'horizon de la guerre s'éloigne un temps même si, rétrospectivement, tous les esprits considèrent que la précipitation dans le conflit relevait de l'évidence.