Le quotidien sous l’occupation allemande et l’opinion

L’opinion

La Meurthe-et-Moselle est occupée pendant près de trois ans, de la création « d’un gouvernement général d’Alsace-Lorraine » à la mi-août 1870, jusqu’au 2 août 1873, pour la majorité du territoire, et jusqu’au 5 septembre, pour les villages sur la route de l’évacuation de l’armée allemande, entre Metz et Verdun, passant par Conflans-en-Jarnisy.

Pendant cette période, la population du « pays annexé » se sent opprimée par les agents du fisc allemands qui augmentent les impôts, et par la police de l’occupant qui n’hésite pas à brutaliser les habitants. En Alsace-Lorraine, on se plaint particulièrement de la guerre que fait l’administration allemande à la langue française dans les écoles.

Alors que de nombreux habitants passent la frontière pour redevenir Français, l’Allemagne organise une campagne de désinformation prétendant que de nombreux émigrés reviennent désillusionnés après avoir été humiliés par ceux qu’ils considéraient comme leurs compatriotes, ainsi qu’une campagne de séduction, mettant en avant la sécurité qui règne dans tout l’empire germanique, ainsi que le paiement des indemnités de guerre dont doivent s’acquitter les Français.

Les options des annexés qui ne notifient pas leur transfert de domicile réel en France, sont annulées. On pousse les optants à retirer leur demande, c’est-à-dire à signer une déclaration par laquelle ils renoncent volontairement à la nationalité française. On les inscrit d’office sur les listes électorales allemandes, puis on leur déclare qu’ils ne pourront voter qu’après avoir annulé leur option. Beaucoup céderont à la pression.

Après l’évacuation, l’opinion publique prussienne est convaincue que la France tombera dans de graves crises politiques et que grâce aux cinq milliards d’indemnités obtenus, l’Allemagne sera si formidablement armée qu’elle n’aura plus rien à craindre de la France pendant des années, mais « il est vrai que les Français sont si téméraires, si irréfléchis, si fous, qu’il faut s’attendre à tout de leur part » rapporte au préfet, le commissaire spécial, Guillaume Schnæbelé (1831-1900), dans une lettre du 25 février 1873, décrivant l’état de l’opinion publique du territoire annexé et de l’Allemagne.