Introduction

« […] Le 9, le 10 [août], la galopade continuait, un sauve-qui-peut enragé qui ne regardait même pas en arrière. Le 11, sous une pluie battante, on descendait vers Bayon, pour éviter Nancy, à la suite d’une rumeur fausse qui disait cette ville au pouvoir de l’ennemi. Le 12, on campait à Haroué, le 13, à Vicherey ; et, le 14, on était à Neufchâteau, où le chemin de fer, enfin, recueillit cette masse roulante d’hommes qu’il chargea à la pelle dans les trains, pendant trois jours, pour les transporter à Châlons […] »

Émile Zola, La Débâcle, 1892, réédition, Paris, Eugène Fasquelle, 1906, p. 50.

La guerre de 1870-1871, fruit des ambitions hégémoniques de la Prusse après avoir écrasé l’Autriche en 1866, est précipitée par des événements diplomatiques dont la célèbre dépêche d’Ems du 13 juillet 1870, dans laquelle Bismarck diffuse aux ambassades la teneur d’un entretien avec le roi Guillaume de Prusse sur la succession au trône d’Espagne. Voulu et déclenché le 19 juillet par Napoléon III, persuadé de la supériorité militaire française, le conflit a profondément marqué le territoire départemental, sa création, le 7 septembre 1871, en est directement issue ainsi que l’annexion par l’Allemagne d’une partie de l’ancienne Meurthe (arrondissements de Château-Salins et Sarrebourg). Si les combats de l’été 1870 n’ont pas vu se dérouler sur l’actuel sol meurthe-et-mosellan de frontales batailles rangées – hormis celle de Mars-la-Tour, le 16 août – ni les plus célèbres opérations militaires – depuis les défaites de Wissembourg et Froeschwiller-Woerth jusqu’au siège de Metz –, ce territoire a été le théâtre de spectaculaires épisodes et actions de guérilla menés par les francs-tireurs et la garde nationale mobile, les célèbres « mobiles » qui ont donné leur caractère original au déploiement des forces armées françaises au cours de ce conflit.

L’exposition 1870-1871 se décline en deux volets. Le premier, qui fait l’objet de la présente publication, couvre la période de la guerre proprement dite jusqu’à la signature de l’armistice, à l’issue du siège de Paris, le 28 janvier 1871. Il retrace notamment les premiers temps et les épisodes saillants du conflit dans l’ancienne Meurthe, en rappelant les spécificités de l’organisation militaire française, que ce soit le spectaculaire coup de main de Fontenoy-sur-Moselle (21-22 janvier 1871) ou l’héroïque siège de Toul (13-23 septembre 1870). Les premiers mois – Nancy est investie dès le 12 août – de l’occupation allemande, qui se prolongera jusqu’en 1873, y sont également relatés en montrant l’évolution de l’opinion face à la guerre et les innombrables rumeurs infondées et parfois hautement fantaisistes qui circulent à l’arrière d’un front instable et mouvant. Le contexte politique national y est rappelé, avec le passage de l’Empire à la République, le 4 septembre 1870, et la présentation de personnalités politiques départementales, tel Antoine Viox, qui s’inscrivent dans ce mouvement. Enfin, ce premier volet de l’exposition 1870-1871 aborde des aspects peu connus de l’occupation militaire prussienne, avec son cortège de réquisitions, de censures et de vexations des populations civiles. Une autorité militaire qui met également en place une administration civile à sa botte, témoignant d’une installation dans la durée de l’occupant sur le territoire, du moins jusqu’au règlement final de la dette de guerre infligée à la France.

        

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