Le Traité de physique naturelle comprenant une explication succinte des animaux, végétaux, minéraux et météores de Dominicus Benedictus Harmant D. med monasp.

      

Arch. dép. Meurthe-et-Moselle, 1 J 1762

 

Dominique Benoît Harmant (1723-1782), docteur en médecine, appartient à une importante famille de Nancy, liée depuis longtemps au duc et à son service. Comprenant des chirurgiens, des apothicaires, puis des médecins, elle s’enorgueillit de l’activité de Louis, le père de Dominique Benoît, qui a été médecin du duc. Dominique Benoît, docteur de la faculté de Montpellier, occupe lui aussi d’éminentes fonctions, hospitalières, scientifiques et sociales. Il est en particulier élu membre de la Société royale des sciences et belles-lettres, la future Académie de Stanislas, en 1752, peu après la création de celle-ci, et, en 1780, choisi comme président du Collège royal des médecins de Nancy qui concurrence la faculté de médecine.

Au cours de sa carrière, Dominique Benoît développe une activité scientifique dans le cadre de son exercice médical et de sa présence dans les institutions officielles. Ce traité en est un exemple. Resté manuscrit, il a l’ambition d’envisager la physique naturelle. Cette appellation, classique, est un pléonasme puisqu’en grec, le mot physique désigne la nature. Il s’agit donc des sciences de la nature et de la connaissance de celle-ci. Elle s’appelait aussi « philosophie naturelle », et correspond à ce qui était autrefois nommé « sciences naturelles ».

Ce traité est resté inachevé et il se présente de manière curieuse : deux parties qui occupent chacune, et donc tête bêche, les premières pages des deux extrémités. L’écriture est serrée, dans l’ensemble assez aisément lisible, presque constamment en français, mais avec cependant une petite partie en latin. Les pages écrites ne sont pas numérotées. Seul le début, là où se trouvent le titre général (Traité…) et le nom de l’auteur, commence par un titre particulier : Des quadrupèdes, oiseaux, poissons, insectes. La suite est écrite sans titres, ni sous-titres, ni vraie séparation des alinéas, et elle mélange différents sujets. Après quelques pages consacrées à la zoologie, viennent des pages couvertes de formules de médicaments, puis une présentation de tels remèdes par indication, ce qui constitue une sorte de partie consacrée à la thérapeutique. L’écriture peut s’arrêter brutalement, par exemple après un titre, tout comme elle peut soudain changer de thème. La rédaction qui occupe la fin du volume, et se trouve donc à l’envers, est plus difficile à lire ; elle donne l’impression d’avoir, peut-être, été écrite plus rapidement. Le passage en latin survient et se termine sans transition.

Cet ouvrage est donc incomplet. Il donne l’impression d’être un brouillon dans lequel D. B. Harmant a écrit, au fur et à mesure qu’il en avait le temps, l’inspiration ou la documentation nécessaire, des morceaux qui, peut-être, auraient dû être organisés et recopiés en vue de constituer un manuscrit complet et cohérent susceptible d’être soumis à un imprimeur. L’examen de ce qui est rédigé tend à montrer que l’auteur n’a pas réellement suivi ce qu’il avait écrit dans le titre qu’il avait lui-même choisi. S’il est effectivement question d’animaux, de végétaux et de minéraux, la partie sur les météores (si tant est que le mot soit celui-là !) n’a pas été rédigée. Par ailleurs, si la partie zoologique tend à respecter le titre qui lui est donné, la partie botanique n’est pas uniquement consacrée à cette science car il s’y trouve aussi de la matière médicale (le mot est écrit en français et en latin), c’est-à-dire les matériaux dont on se sert pour préparer les médicaments, en d’autres termes, les drogues, ce qui ne constitue pas de la botanique au sens strict. Ceci est d’autant plus vrai que la matière médicale s’adresse aussi aux drogues minérales et animales. Il y aurait eu là une articulation à trouver dans la présentation du manuscrit. Enfin, la présence des formules de médicaments et leur présentation par indication n’a en principe pas sa place dans un ouvrage sur ce thème. Ces formules sont néanmoins extrêmement intéressantes, car elles doivent être en relation avec la pratique médicale de D. B. Harmant à Nancy. Il serait certainement judicieux de les comparer à celles qui se trouvent dans la Pharmacopée des pauvres du professeur Nicolas Jadelot, parue à Nancy quelques années seulement après la mort d’Harmant. Jadelot était professeur à la faculté de médecine. L’un et l’autre ont été des figures importantes de la médecine nancéienne de la fin du siècle des Lumières.

Pierre Labrude

Association des amis du musée de la santé de Lorraine